Avec cette tragédie, les blogueurs francophones réagissent comme cette très beau billet : Lettre à Henri, mon ami Espagnol du blog Tout Fout Le Camp ; extrait :
"Cher Henri
La dernière fois que l'on s'est vus, c'était en 1969. A l'orée de ma trentaine, je quittais Paris pour la Bretagne. Nous travaillions dans le même bureau, dans ce préfabriqué perdu dans les vestiges de l'ancienne usine à gaz de Clichy. Nous avions noué une amitié de travail qui, si le temps lui avait été donné, serait j'en suis persuadé, devenue une belle amitié d'hommes. La vie en a décidé autrement, et nous nous sommes perdus de vue. Toi l'Espagnol, et moi le Breton avions en commun nos modestes origines. Nous étions des enfants de prolétaires. Tu venais de Navalmoral de la Mata (tu vois, je m'en souviens !) et habitais le quartier de Franc-Moisin à Saint-Denis. Nous partagions un goût modéré pour les tâches qui nous incombaient et un goût immodéré pour le jeu du morpion où nous nous affrontions dans un championnat du monde dont nous étions les seuls participants.
Hier, quand j'ai vu les premières images du carnage madrilène, c'est immédiatement à toi que j'ai pensé. Je ne sais pourquoi mais c'est ainsi. Les méandres de la pensée et de l'émotivité sont mystérieuses.
Une image m'a marqué au point de me faire fondre en larmes. Un homme, rescapé, expliquait qu'autour de lui ce n'était que corps déchiquetés, blessés hurlants dévorés par les flammes. Dans ses yeux hagards l'indicible se lisait. Des sanglots hachaient ses paroles et sa tête a trouvé refuge sur l'épaule d'une femme dont les bras se sont doucement refermés sur lui. C'est à cet instant que ton souvenir m'est revenu. Comme tu es le seul Espagnol que je connais, plutôt qu'à Monsieur Aznar ou au Roi d'Espagne (Chirac et Raffie l'ont déjà fait, d'ailleurs), c'est à toi que je viens dire combien je me sens proche de cette souffrance. Je pense à tous ces hommes, femmes, enfants de "L'Espagne d'en bas" morts, mutilés, marqués dans leur chair, dans leur esprit. C'est comme si mes frères, mes soeurs et leurs enfants avaient été touchés (...)."
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