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11 mars 2004

La fracture numérique : analyses du chercheur et universitaire belge Gérard Valenduc

Gérard Valenduc est l'un des rares chercheurs sociologues francophones qui étudie depuis de nombreuses années le rapport homme-machine et comment les nouvelles technologies impactent notre vie. Mais surtout, il s'intéresse avec sa collègue Patricia Vendramin à la fracture numérique et ce couple d'universitaires belges est connu mondialement pour leur analyse sur le sujet marquées par des observations quantifiables et qualifiables.
Le discours bienséant sur le fossé numérique est souvent marqué par des prises de positions non fondées scientifiquement que chacun arrange à sa sauce. Ce n'est pas le cas avec Patricia Vendramin et Gérard Valenduc dont je vous recommande vivement la lecture de cet ouvrage fort instructif : Internet et inégalités - Une radiographie de la fracture numérique (Editions Labor, Collection Quartier Libre, 2003 - 87 pages).

Les propos reproduits ci-dessous sont issus de mes notes lors de l'intervention de Gérard Valenduc aux Rencontres Wallonnes de l'Internet Citoyen, ce 8 mars à Charleroi.

En Europe, la fracture numérique entre les hommes et les femmes tend à se réduire alors qu'elle était très marquée il y a quelques années. De même, on assiste à une réduction de la fracture numérique chez les personnes âgées (sachant que le critère CEE - pour qualifier statistiquement une personne âgée - est qu'elle ait plus de 45 ans). Ceci est à relativiser car les jeunes retraités ont, pour beaucoup, déjà utilisé l'internet et l'informatique dans leur cadre professionnel avant leur retrait de la vie active.

Le travail joue un rôle essentiel dans l'appropriation d'Internet. D'ailleurs, les cours collectifs ou projets de groupe de socialisation Internet fonctionnent à plein, la plupart du temps, en Belgique ces derniers mois.

Pour la fracture numérique, il y a plusieurs forts facteurs discriminants. Le principal est le revenu du ménage avec en corollaire la catégorie socio-professionnelle.
Les écarts mondiaux dans l'appropration d'internet et des nouvelles technologies sont préoccupants. Mais c'est encore plus grave entre les pays du Sud et d'autres pays du Sud : on évoque alors une crevasse numérique plus qu'un fossé.

Il y a peu de progrès dans l'appropration d'internet et de l'informatique dans des groupes dits "à risque" d'exclusion que sont les femmes seules avec enfants notamment. Celles-ci cumulent de plus en plus souvent des emplois à temps partiel dans des branches d'activités où l'on a peu accès aux nouvelles technologies. La pénétration d'Internet est alors très faible.
La deuxième population ayant des difficultés d'accès et d'appropriation des technologies de l'information et de la communication sont les jeunes en rupture scolaire. Hors, ce sont eux qui ont besoin à leur âge, de tisser des réseaux de sociabilité forts, d'avoir accès à l'emploi, et de posséder des repères spatiaux clairs dans leur propre vie (domicile, lieux de loisirs, lieu de travail...).

Des fractures numériques de second degré apparaissent selon le type d'usages développés par les personnes : egovernment, ecommerce, elarning. Est-ce que tout le monde peut acquérir des compétences dans la Société de l'Information ? Rien n'est moins sûr.

Et toutes les différences d'usages ne donnent pas lieu à des inégalités.
Le fait qu'on soit utilisateur ou non d'Internet induit des discriminations dans 4 principaux domaines :
- l'accès à l'emploi : même pour des emplois peu qualifiés, on demande désormais une familiarisation à l'Internet,
- la consommation,
- la sociabilité : l'informatisation supprime des emplois : on casse des réseaux de sociabilité non recréés en ligne,
- la démocratie et l'égalité d’accès qui passe notamment par la représentativité de la société civile en ligne.
Les grouvernements sont contraints à garantir l’accès par différents canaux (téléphone, Web, guichets , non virtuels...).

Gérard Valenduc cite alors l'exemple de banques en ligne qui sélectionnent ainsi les clients en opérant un choix parmi des internautes connectés à défaut de rendre en compte des publics non connectés à l'Internet.

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