"Bagdad reste la cité invisible. Quand on prend le temps de la regarder, c'est de haut, depuis le toit d'un hôtel où nos aléas quotidiens nous aménent à séjourner. On voit son corps uniforme qui s'étend vers un horizon barré par la masse solide et verte des palmerais mésopotamiennes. On imagine comme il doit faire bon divaguer dans ses quartiers résidentiels d'où surgissent des nuées de palmiers et de plantes luxuriantes. On entend aussi les enfants jouer dans les rues défoncées bordées de drain à ciel ouvert de Salaam City, la favela chiite, repoussée vers les confins du désert par un Saddam désireux de conserver à sa capitale l'aspect polissé d'une ville sûre d'elle. Et puis, on imagine la gentillesse et les sourires, ceux que l'on attrappent parfois, presque par mégarde, à travers les vitres fumées de nos 4 x 4, magré l'aggressivité de notre présence et de nos chauffeurs pris dans des hallucinations dignes de Taxi 3.
On imagine. Plutôt que de découvrir trop vite, on imagine. On s'en tient à une découverte par jour. La cité reste invisible, certes, mais juste un peu moins chaque jour."
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