Blogue d'actualite du blogue et d'ailleurs sur le Web... Blogue mémoire en ligne depuis 2003... Précurseur en son genre, ce "blogue de liens" existe depuis la nuit des temps (en âge blogosphèrique). À sa naissance il participa aux grandes lignes de l'infernale blogosphère, puis des remous virtuels le firent tanguer sans arriver à le faire sombrer. Il se retrouva en ces eaux paisibles d'où il vogue désormais sans peine ni tracas...

07 août 2004

Le billet du jour

Du blog Rue Lepic :
"Elle poussa la porte et la chaleur l'envahit ; c'était derrière elle : la climatisation, la musique d'ambiance, le cliquetis du clavier, à chaque pression de chaque touche. Le bip du code barre, celui de la balance, celui du clavier à code pour cartes bancaires. Au loin le grésillement des talkies des vigiles. Tout près l'écho des autres caisses. En fond, les jingles en boucle annonçant les dernières promotions. Derrière, les alarmes du rayon boulangerie, annonçant la cuisson à point de la pâte à pain surgelée. Tout devant et presque audible, la tension continue des clients. Les cris des enfants, ceux, retenus ou non, des parents. Et le doux frou-frou du système d'aération. Fini pour aujourd'hui.
Derrière Hanna il y aussi son pays, puis son départ; tout ce qu'elle voit d'ici, depuis, comme des humiliations et qu'elle sait ne pouvoir partager avec personne. Sa différence, c'est sa solitude et c'est aussi son enfance.
Hanna prend son temps pour rentrer. Tout ce poids derrière elle, c'est la légèreté. Ces gestes toujours répétés, c'est le gage de sa liberté.
Tout cela suit Hanna lorsqu'elle marche dans la rue, une fragance indétectable qui la suit, qui la porte, dans la lenteur de ses pas, qui lui donne, à quarante-deux ans, l'air d'une petite vieille qui rentre de sa promenade de l'après-midi.
Hanna vivait au septième étage d'un haussmanien du Xème arrondissement et la montée au colimaçon de bois lui assurait une arrivée le rouge aux joues et le souffle d'une vache en pleine course.
Lorsqu'elle vit deux personnes qui attendaient, sur son palier, elle mit du temps avant de comprendre que c'était bien elle qu'ils attendaient. De leur côté, les deux hommes durent s'approcher un peu pour reconnaître le visage rougi par l'effort. Finalement, le plus petit s'approcha encore un peu plus puis lança :
- Salut, Hanna !
Hanna mit encore de longues secondes avant de reconnaître Vaklav. Le manque d'oxygène et les vingt années qui devaient les séparer de leur dernière rencontre la firent s'écrouler sur le palier, dans un bruit sourd."

Posté le 6 août 2004.

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