5h45, notre chauffeur arrive. Nous embarquons nos sacs à l'arrière du "GMC Truck Suburban". Dans les rues, très peu de voitures et presqu'aucun piéton. Dans deux heures, les rues seront saturées de monde et de véhicules. Nous quittons lentement Bagdad. Notre chauffeur dit que la semaine dernière, il a été arrêté par les "brigands de la route" et qu'il a vu un autre GMC criblé d'impacts de balles. Voilà une information qui rassure… avant de nous engager sur l'autoroute pour près de 1000 km.
6h15, nous distinguons une courte file de voitures au loin, sous un pont. En nous rapprochant, nous nous apercevons qu'il s'agit d'un check-point placé ici par les Américains pour contrôler les véhicules qui relient Bagdad à Amman. Nous sommes aussi sur la route de Ramadi… Deux chars sont placés en travers de la route, leurs mitraillettes lourdes orientées à 90° l'une de l'autre. Ils sont sept ou huit soldats armés dont un, allongé au sol, nous tient en joue. Sept ou huit policiers irakiens effectuent la fouille, plus décontractés. Chaque voiture est contrôlée avec un intervalle de 30 m entre celle qui est fouillée et la suivante. Nous descendons du GMC. Quatre GI's nous entourent pendant que les policiers irakiens ouvrent le coffre, soulèvent un à un les sacs. J'essaye de soutenir le regard des GI's, d'en croiser un du moins. Ils restent impassibles. L'un me dit : « Veuillez vous écarter de l'endroit de la fouille, s'il vous plaît. » Je m'éloigne. Tout est ok. Nous remontons dans le GMC et repartons. Sur le côté de la route, nous retrouvons les pneus éclatés, en grand nombre. Plus loin, une carcasse de char irakien, rouillée et calcinée. Plus loin encore, un blindé léger dans le même état.
A un moment donné, notre chauffeur ralentit alors qu'il était lancé à plus de 150 km/h. Au bout de quelques minutes, il accélère à nouveau. Je m'aperçois alors qu'il y a une Chevrolet du même gabarit que la nôtre derrière nous. Je demande au chauffeur s'il a attendu pour former un convoi. Il me répond que oui. C'est une mesure de sécurité. Que vaut-elle, je n'en sais rien. De temps à autre, nous croisons une voiture qui roule en sens inverse sur la même voie que la nôtre... 400 chauffeurs jordaniens font la navette entre Amman et Bagdad. Il y a un sacré business dans cette portion depuis la dernière guerre. Au kilomètre 374, nous apercevons un check-point sur la voie opposée de la nôtre : des chars, des blindés, des soldats et, assis par terre, deux Irakiens les mains liées dans le dos et surveillés par un GI debout devant eux. Dépassé ce point de contrôle, nous ne voyons plus que le désert à perte de vue, à droite et à gauche, devant et derrière : un océan de sable.
2h30 plus tard, nous arrivons à la frontière jordanienne. Une file de voitures et de camions attend de passer au contrôle. Pendant que notre chauffeur roule au pas, nous allons présenter nos passeports à la douane. Une heure plus tard, après avoir été fouillés une nouvelle fois, nous repartons. Nous sommes en Jordanie. Nous laissons l'Irak derrière nous pleins d'amertume et de questionnements.
18h, arrivée à Amman ou bien sommes-nous toujours à Bagdad ? Je ne le sais pas encore…
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