Via Michel Dumais pointe vers 3 articles du magazine en ligne Combats par des universitaires se penchant depuis bien des années sur le Web.
- Tout d'abord, une mini-entrevue du techno-réfractaire Philippe Breton (sociologue, Université de Strasbourg - France) :
"Car l’accès à internet dépend d’une étape préparatoire — la capacité a organiser du savoir — qui est déjà inégalitaire. A quoi peut bien servir une technologie aussi puissante dans les mains de personnes qui parviennent à peine à lire, sinon à creuser l’écart qui les sépare des nantis. Vieille histoire ! C’est aussi un problème de formation ? La clef réside en effet dans la compétence à se servir de ces nouvelles technologies (...)."
- Pierre Lévy (philosophe, Université de Ottawa - Canada) qui évoque les blogs dans ses propos :
"Cette fameuse relation hypertextuelle se traduit aujourd’hui par l’explosion de ce véritable genre littéraire hier encore inexistant qu’on appelle les "blogues" (de l’anglais weblogs). A l’origine, ces journaux personnels de navigation se structuraient autour de liens vers d’autres sites commentés. Aujourd’hui, les blogues se sont spécialisés et leur nombre est tel (plus de 500,000 blogues NDLR) qu’ils s’agrègent en réseaux en constante transformation. Car la dimension indexicale y est fondamentale tant du point de vue documentaire que sémiotique. Cette possibilité de «pointer», de montrer ce dont on parle en produisant illico les documents et les archives qui fondent nos dires, constitue sans doute l’innovation la plus importante de la rhétorique, aujourd’hui. Bien que sa finalité demeure inchangée — toucher l’esprit humain — cette manière de signifier affecte déjà le mode de présentation des textes au sein de la communauté scientifique. Ainsi, la mise en ligne des archives dans un champ de recherche donné aurait tendance à rendre nulle et non avenue la paraphrase." Ca donne à réfléchir !
- Enfin, Christian Vandendorpe (sémiologue, Université de Ottawa - Canada) s'intéresse aussi aux carnets Web :
"Le domaine de la littérature intime connaît une explosion spectaculaire avec les journaux personnels et les "blogues" (de l’anglais weblogs) grâce auxquels tout un chacun peut maintenant publier sur le Web ses opinions et ses états d’âme sans aucun filtre éditorial. Beaucoup de ces passionnés de l’expression personnelle sont regroupés dans des communautés virtuelles ou font de leur site des carrefours ouverts à d’autres cyberdiaristes et se commentent mutuellement. Ces journaux offrent une source inépuisable de lectures à celui qui cherche dans la littérature des aperçus sur le rapport particulier que chacun établit avec soi-même et autrui."
Ce dernier point est plus particulièrement intéressant.
A force de lire, de lier, je pense de plus en plus que le blog permet de placer un "soi" sur le Web qui évolue entre l'auto-centré (JE parle) et la distribution de liens qui pointent vers L'AUTRE.
C'est entre le JE et l'AUTRE que tout se joue d'où la difficulté à définir le blog... Car ce qu'on cherche à définir à travers son expression sur le blog, c'est peut-être le fait de se donner une identité dans ses rapports à l'AUTRE ; un exercice pas évident parce que placé d'abord dans la virtualité.
Du coup, nous cherchons, soit à nous raccrocher à un réel (ou à le reproduire en expression bloguesque), soit on cherche à s'abstraire de cette réalité (en produisant de l'imaginaire, en s'attachant à une technicité ou encore à la technologie normée ou à normaliser). C'est juste un début de réflexion !
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